Hornstrandir est une réserve naturelle située dans les Westfjords d’Islande. Cette péninsule isolée dont le climat est réputé des plus extrêmes est coupée du reste du pays par le glacier Drangajökull et ses rivières glaciaires qui empêchent toute connexion par la route.
J’ai découvert Hornstrandir en travaillant sur les renards polaires. Depuis, je suis devenu guide dans la réserve. Mais le carnet de voyage que je vous propose aujourd’hui est celui de mon premier trek dans la région. Un trek un peu osé étant donné que l’itinéraire traverse le glacier Drangajökull ! Cet itinéraire est donc réservé aux randonneurs expérimentés et bien équipés.
Je m’appelle Samy Berkani, je suis photographe animalier, guide de randonnée et guide photo. Je propose notamment un stage photo renard polaire en Islande.
De la découverte à l’expédition
Il y a quelques années, avec mon ami et collègue Urip, nous avons observé une des langues glaciaires de Drangajökull d’assez loin. Cette image a éveillé notre curiosité, elle ne nous quittera plus.
Quelques mois plus tard, nous décidons de nous renseigner sur une traversée du glacier.
Durant quelques semaines, nous nous préparons, cherchons des cartes, des images du glacier, des personnes l’ayant potentiellement traversé … Malgré le peu de résultat, nous finissons par nous convaincre que la traversée est possible sans matériel d’alpinisme, à l’exception d’une paire de crampons à 6 pointes. C’était comme une intuition. Nous n’avions pas de plan B, nous devions soit traverser par l’itinéraire que nous avions tracé, soit rentrer à la maison !
Nous décidons de tenter l’aventure début juillet, pour profiter d’une météo favorable avant que la glace ne soit fragilisée.
Le plan était de traverser le glacier d’est en ouest en partant de la vallée de Kaldalón, de déboucher dans le fjord de Reykjarfjörður et de bifurquer ensuite vers le nord pour rejoindre la réserve de Hornstrandir. Une fois dans la réserve, nous avions prévu de longer la côte nord jusqu’à Hloðuvik avant de couper vers le sud au niveau du fjord de Hesteyri pour quitter par ferry et rejoindre Ísafjörður. Voilà le programme de notre trek de 10 jours à Hornstrandir.
Jour 1 : De Kaldalón à Drangajökull
Nous entamons la marche le premier jour dans la vallée de Kaldalón en prenant immédiatement de la hauteur pour éviter la zone inondée par la rivière glacière. Cette première partie de l’itinéraire n’est pas facile, il nous a fallu choisir entre une zone marécageuse et une zone forestière de petits bouleaux d’un mètre et demi, un enfer pour la marche! Mais c’est le chemin que nous choisissons, le but premier en Islande étant de rester au sec autant que possible.
Nous arrivons au pied du glacier après une demi journée de marche, assez difficile je dois le dire. Nous posons le pied sur le glacier non sans émotion et excitation. Nous restons vigilants mais nous profitons de chaque instant. Nous sommes sur la face ouest du glacier, et nous découvrons qu’elle est entièrement recouverte de neige. Nous grimpons donc sans crampons, les chaussures de marche font très bien l’affaire.

L’ascension du glacier Drangajökull
Grimper au sommet du glacier Drangajökull est comme courir un marathon. La pente est douce, facile, mais nous avions une impression d’une marche interminable. Devant nous, impossible de dissocier la neige du ciel, il n’y a pas de ligne d’horizon. Derrière nous, la vallée de Kaldalón et l’océan au loin. Ce paysage semble immobile. On a beau avoir fait plusieurs kilomètres, la vallée semble toujours proche. Sur les côtes, la roche laisse peu à peu place à un paysage de glace, minimaliste, hors du temps.
Nous arrivons au sommet du glacier en fin de journée, après avoir fait 900m de dénivelé sur une quinzaine de kilomètres. Il y règne une atmosphère difficile à décrire : un silence total, un paysage fait de lignes, de courbes et de couleurs froides. Nous osons à peine rompre cette quiétude.

Nous installons le campement. Nous sommes épuisés. Nous échangeons quelques ressentis autour d’un repas avant de nous glisser dans nos duvets. Cette nuit a été l’une des plus paisibles de ma vie !
Jour 2 : De Drangajökull à Reykjarfjörður
Redescendre est toujours plus facile. Mais dans le cas du glacier Drangajökull, nous avons dû chausser les crampons car la neige avait fondu sur la face est. Nous progressons tranquillement, avec comme repères deux pics rocheux noirs qui nous permettent de nous repérer dans cette immensité blanche. Environ 2 km avant d’arriver en bas, nous commençons à entendre la rivière sous le glacier. Nous décidons de ne pas prendre de risque et nous remontons quelques centaines de mètres plus au nord.
Arrivés en bas, nous découvrons une impressionnante alliance de minéral et de glace. Nous étions comme des enfants, avec nos appareils photos, à ausculter les blocs de glace sous toutes les coutures. Nous avons tout de même essayé de garder la tête froide, un accident est vite arrivé !
Après un déjeuner au pied du glacier, nous reprenons la marche vers Reykjarfjörður, en jetant régulièrement des coups par-dessus nos épaules. On ne quitte pas un glacier aussi facilement…
Une dizaine de kilomètres nous séparent du camp, mais nous profitons de chaque instant. La vallée que nous traversons est magnifique. De la roche, de la mousse, des ruisseaux et une vue sur le fjord au loin.
Reykjarfjörður, un fjord insoupçonné et … chaud !
Nous ne sommes pas encore à Hornstrandir. Le camp de Reykjarfjörður est privé et payant (contrairement à ceux de la réserve qui sont tous gratuits). Peu avant d’arriver, nous débouchons sur un lac, mais un lac pas comme les autres. En effet, de la fumée s’en dégageait! En islandais, Reykja signifie “fumée” ou “vapeur”. Nous sommes devant l’une des sources d’eau chaude des Westfjords. Des dizaines de phalaropes à bec étroit occupent le lac. Nous décidons de ne pas nous y baigner. Et pour cause, quelques dizaines de mètres de là, une vraie piscine,
Quelques dizaines de mètres plus loin, une vraie piscine a été construite dans les années 30. Après être resté quelques minutes à photographier les phalaropes dans le lac, je retrouve mon ami Urip, allongé au bord de la piscine, sous un grand ciel bleu. Il est temps de se reposer et de profiter du bain chaud!
Jour 3 : De Reykjarfjörður à Furufjörður
Au petit matin, après un porridge et un café en guise de petit déjeuner, nous décidons de profiter d’une dernière baignade avant de partir pour Furufjörður. Les 40 degrés de la piscine est un appel à la flemmardise, et il nous aura fallu du courage et de la motivation pour sortir de l’eau, nous sécher, nous habiller et entamer cette nouvelle journée de marche.
Les fjords de Reykjarfjörður et Furufjörður sont séparés par une colline et une montagne. Après la colline, nous découvrons une zone marécageuse sans sentier et une large rivière glacière. Le contraste avec l’eau chaude de la rivière est pour le moins saisissant ! Nous traversons la zone sans chaussures, les pantalons remontés jusqu’aux genoux. Dans la réserve naturelle de Hornstrandir, traverser des rivières est le lot quotidien, le tarif minimum est de deux rivières par jour !
Nous entamons ensuite l’ascension de la montagne. Plusieurs plateaux nous mènent au sommet, avec, comme à chaque fois, une très belle vue sur le fjord que nous laissons derrière nous et celui que nous découvrons. Le glacier n’est pas loin à notre gauche. Nous entamons la descente en nous demandant ce que sont les deux maisons qu’on voit au loin.
Une cabane du bout du monde!
Furufjörður, contrairement à ce que son nom indique, est une large baie constituée essentiellement de marécages. Nous passons une première maison qui est ce qu’on appelle en Islande “a family house” (une maison de vacances). Nous arrivons ensuite au camp, où nous découvrons un refuge, très ancien, très abîmé, mais encore debout. Le rouge semble ouvert. Après un rapide coup d’œil, nous décidons d’y passer la nuit.
Nos voisins les renards polaire
Cette nuit fut agitée. Nous n’avons compris que trop tard que sous le refuge, une famille de renards polaires avait élu domicile. Les allées et venues des parents pour nourrir les petits, les cris et les bagarres ont eu raison de notre sommeil. Le matin, nous n’avons pas pu les observer. Les renards étaient trop craintifs, et le plancher très bruyant.
Jour 4 : De Furufjörður à Smiðjuvík
Nous quittons notre refuge de Furufjörður qui, malgré son aspect en ruines, est très confortable. Nous contournons la montagne Hádegishnúkur par la côte. Marcher sur des galets est éprouvant pour les chevilles et les genoux. Ce ne sera pas notre partie préférée de la journée. Derrière la montagne nous découvrons le camp de Bolungarvík. Le camp est désert, nous n’avons toujours pas croisé d’humain depuis le début de notre trek!
Un refuge privé nous sert d’abri contre le vent, nous nous installons derrière pour préparer un repas rapide : du couscous, des raisins secs, des cacahuètes, des épices et de l’huile d’olive, notre pack de nourriture préféré pour l’autonomie.
Durant le déjeuner, nous observons au loin la première montagne que nous devons gravir. La pente semble raide, et le nom du passage, Göngumannaskarð, est terrifiant!
Arrivés au pied de la montagne après une zone marécageuse, nous ne trouvons pas le sentier. Après un quart d’heure de recherche, nous décidons de grimper à travers la toundra.
L’ascension est difficile, les myrtilles hautes de 20 cm compliquent la marche. Après 300m de dénivelé, nous sommes contents de retrouver le chemin qui nous mène au passage. De l’autre côté, une vallée marécageuse et une rivière large d’une vingtaine de mètres nous attendent. Nous entamons la descente pour éviter de trop réfléchir à l’effort qui nous attend, parfois, il faut savoir marcher sans penser à ce qui vient.
Smiðjuvík, le camp le plus isolé de Hornstrandir
Nous traversons la vallée et attaquons la seconde montagne, moins haute que la première.
Après une heure de marche, nous découvrons le camp de Smiðjuvík, perdu dans une petite baie et une vallée peu profonde.
J’avais rencontré une personne dont la grand-mère était née dans ce lieu. Je me suis demandé comment des humains ont pu vivre dans un environnement aussi hostile, exposé plein nord !
Mais Smiðjuvík est une très belle baie, entourée de montagnes, de petites falaises et de roche noire. Ce soir-là, nous observons deux renards polaires au loin. Ils sont les seuls habitants de Smiðjuvík!
Jour 5 : De Smiðjuvík à Hornbjargsviti
Durant le petit déjeuner, nous observons de nouveau des renards polaires de loin.
Nous laissons derrière nous les montagnes et nous nous dirigeons vers les célèbres falaises de Hornbjarg. Cette partie du trek semble présenter peu de dénivelé sur la carte, mais la succession de collines rend la marche plutôt physique.
Hornbjargsviti est un phare. Après une heure de marche nous l’apercevons déjà. Il semble tout proche, pourtant il nous faudra 6h de marche pour l’atteindre. Nous traversons une vallée, un plateau et nous débouchons sur la chute d’eau de Drifandi. Là, nous restons scotchés un moment devant le paysage. La rivière tombe à pique le long d’une falaise aux allures de mur. Nous décidons de déjeuner dans un environnement de rêve avant de gravir la montagne qui nous sépare du phare.
Après le repas, nous avançons encore jusqu’au camp de Bjargarnes et nous descendons pour traverser une zone marécageuse et une rivière (comme chaque jour vous me direz …). Nous entamons l’ascension avec une pente douce, mais la difficulté augmente à mesure que nous avançons. Au bout de quelques centaines de mètres, les choses sérieuses commencent. La pente est raide et le reste jusqu’au sommet.
De tout la haut nous découvrons le phare, les falaises accidentées, une rivière et sa chute d’eau, mais surtout la face est de Hornvik qui est désormais visible!
Hornbjargsviti, ou le phare des falaises de la corne
Il n’y a personne dans le phare. Pourtant, il était censé être ouvert. Le bâtiment fait office de gîte d’étape en été. Il est possible d’y dormir dans des chambres dortoirs. Nous décidons de monter le campement à l’abri du vent en utilisant le bâtiment. Il règne une étrange atmosphère dans ce lieu. Des personnages en bois flotté sont plantés au sol. Une balançoire grince à chaque fois que le vent souffle. Une corde à linge rappelle qu’un gardien a vécu ici. J’ai l’impression d’être dans un décor de cinéma, ou dans l’un de ces livres qui vous embarquent dans la vie autrefois sur les îles de l’Atlantique nord.
Le bord de la rivière est colonisé par les myrtilles, dommage que ce ne soit pas encore la saison !
Jour 6 : De Hornbjargsviti à Hornvik
Nous quittons au petit matin Hornbjargsviti sous un soleil radieux. La journée commence par l’ascension vers les falaises de Hornbjarg. L’itinéraire est impressionnant tant il longe des falaises, des murs de roches et des chutes d’eau d’une hauteur vertigineuse.
Nous avons prévu une courte journée. Le but est de pouvoir prendre le temps, profiter des paysages et faire des photographies.
Nous atteignons la crête et découvrons la face est de Hornvik et une partie de la baie. Nous sommes scotchés devant ce paysage majestueux. Les falaises semblent avoir été arrachées à une montagne noire. La baie est protégée par des pics rocheux qui forment un cirque. Nous passons un moment devant ce spectacle avant de redescendre vers le premier camp de Hornvik, notre destination finale de la journée.
Le rituel est maintenant rodé. Chaque soir, nous installons le camp, préparons à manger et partageons nos impressions de la journée. Mais ce soir-là était spécial. Nous n’avons pas seulement observé des renards polaires au loin. Nous avons littéralement partagé le camp avec des renards adultes et des renardeaux qui ne se souciaient guère de notre présence. Dans ces moments-là, je me sens privilégié. Il faut savoir que la chasse est interdite dans la réserve de Hornstrandir. Les renards polaires vivent là en toute quiétude. Et ces moments pacifiques sont devenus rares, surtout en France où la chasse rend les animaux très craintifs.
Le Groenland à moins de 300 km
Ce jour-là, je ne savais pas qu’il était possible de voir le Groenland depuis Hornvik. Mais depuis, j’ai eu la chance d’assister à ce spectacle visible uniquement certains jours de l’année. Depuis les falaises de Hornvik, j’ai vu une chaîne de montagnes enneigés dessinant la ligne d’horizon. L’image ne m’a jamais quitté, c’était une invitation !
Jour 7 : Le Tour de Hornvik
En islandais, le mot “horn” signifie “corne” et le mot “vik” signifie “baie”. Hornvik est donc la baie de la corne, en référence à la forme de la péninsule et des pics rocheux qui plongent dans l’océan.
Visiter Hornvik est l’un des highlights de ce trek, tant le lieu est réputé pour être l’un des plus beaux paysages d’Islande.
Au jour 7, on quitte le camp pour suivre le chemin qui monte jusqu’à la corne et qui en fait le tour. L’itinéraire longe la falaise (à déconseiller si vous avez le vertige donc …) où des dizaines de milliers d’oiseaux nichent (essentiellement des fulmars, des mouettes tridactyles et des guillemots de troïl). Peu avant le sommet, une corde permet de grimper les derniers mètres. Tout la haut, nous découvrons une vue panoramique à couper le souffle! Au nord, le Groenland à moins de 300 Km. à l’ouest, la baie de Hornvik. À l’est, les falaises de Hornbjarg. Enfin, au sud des pics rocheux se dressent comme pour protéger le glacier Drangajökull.
Les terriers de renards polaires
Sur notre chemin, j’en profite pour observer les renards polaires et répertorier les terriers. Ces terriers sont utilisés de génération en génération, parfois depuis plusieurs siècles. Ils sont parfois creusés en bord de falaise, parfois sous la roche non loin d’une plage.
Aujourd’hui, j’ai la chance de pouvoir assister à la vie des renards polaire de Hornstrandir tous les ans, de voir les familles se former, les renards naître, grandir, et parfois périr. De les voir devenir adultes et s’émanciper en septembre. Lorsque je quitte la réserve en octobre, les cartes sont rebattues, en attendant la saison suivante et les nouvelles batailles de territoires.
De retour au camp, nous rassemblons nos affaires et entamons la marche vers le second camp de Hornvik, qui est situé à seulement 4km du premier. Pour le rejoindre, nous traversons une rivière peu profonde de 80m de large et une zone assez insolite de dunes de sable noir. Le ciel nous gratifié d’une magnifique lumière pour conclure cette journée.
Jour 8 : De Hornvík à Hlöðuvík
A Hornvik, c’est le retour à la civilisation. Non pas que la baie grouille de monde, mais nous y croisons quelques randonneurs. Nous prenons le petit déjeuner et le café en échangeant avec les locataires du camp et la ranger du parc avant de plier bagages pour Hlöðuvík. La pluie s’invite mais nous gardons le moral.
Nous contournons la montagne de Einbúi par la côte. Encore une fois, les galets nous usent les articulations. La marée est haute et quelques passages nécessitent d’ôter les chaussures et parfois de courir entre deux vagues. Nous entamons ensuite la montée jusqu’au col de Atlaskarð. La pente est plutôt douce avec un dernier passage pentu mais court juste avant le col. De la haut, nous avons vu sur la baie de Hlöðuvík qui a la particularité d’être en forme de cœur. En 5 minutes il cesse de pleuvoir, le ciel est bleu, bienvenue en Islande!
Nous jetons un œil de l’autre côté, la pente est raide voire dangereuse par endroit. La roche mouillée est glissante, nous prenons tout notre temps pour redescendre.
En bas, nous arrivons devant une maison de vacance et un chalet jaunes. De petites maisons d’elfes sont éparpillées ici et là. En y jetant un œil, on se rend compte qu’elles abritent les équipements de la maison comme la pompe qui récupère l’eau de la rivière.
Le camp de Hlöðuvík
Le camp est à un kilomètre, mais il se mérite. Nous traversons une dernière rivière et découvrons l’aire de campement, deux toilettes sèches et un refuge d’urgence. Ces refuges ont été construits sur la face nord de Hornstrandir pour permettre aux pêcheurs en difficultés de s’y abriter. On y trouve de quoi survivre comme du gaz, une couverture, mais aussi une radio à partir de laquelle il est possible de lancer un SOS aux secouristes et aux gardes côtes. Mais attention, cet équipement ne doit être utilisé qu’en cas de force majeure, c’est-à-dire un danger de mort. Aujourd’hui, ces refuges sont aussi utilisés (parfois avec abus) par les randonneurs.
Nous installons notre campement et préparons notre dîner. En fin de journée, nous observons pour la première fois du séjour un renard polaire blanc (les autres étaient bruns). Nous tentons une approche mais le renard était farouche. Nous décidons de le laisser tranquille et de profiter de la soirée au bord de la plage.
Jour 9 : De Hlöðuvík à Hesteyri
Après des jours passés sur la côte nord de Hornstrandir, nous nous apprêtons à bifurquer sur la face sud. Nous laissons derrière nous le camp de Hlöðuvík et contournons la montagne Álfsfell par la côte. L’enchaînement de journées de marche commence à se ressentir, nous sommes beaucoup plus lents qu’au début.
Pour rejoindre Hesteyri depuis Hlöðuvík, il y a un seul passage, celui de Kjaransvíkurskarð, réputé pour des vents forts. Et le passage n’a pas trahi sa réputation! Une fois arrivés en haut, nous nous déplaçons de passer de l’autre côté pour nous abriter. Un vent glacial régnait en maître !
De l’autre côté, nous découvrons le plateau qui mène à Hesteyri. Nous mettons trois heures à le traverser. Les chemins sont rares, la marche se fait essentiellement sur des cailloux plats provenant de roche que le gèle a explosé. Une ambiance lunaire y règne, beaucoup de rivières et de ruisseaux, et quelques lagopèdes alpins qui nichent dans les pierriers. 7 km de marche dans cet environnement est un supplice pour les genoux. Nous sommes heureux d’arriver au bout et de découvrir le mythique village de Hesteyri, ses quelques maisons, son cimetière et son ancienne station baleinière norvégienne. Nous profitons de la vue qui donne jusqu’au sud du fjord Ísafjarðardjúp.
The Doctor’s House
Arrivés en bas, nous passons à la Doctor’s House, un endroit que nous reconnaissons pour l’avoir vu dans le film d’horreur “I remember you” (nous vous recommandons de voir le film plutôt après avoir séjourné à hornstrandir…).
À l’intérieur, une ambiance “vieille Islande”, entièrement en bois. Nos regards s’arrêtent sur une ardoise qui affiche “tarte à la rhubarbe” et “bière locale”. Inutile d’aller plus loin, c’est là que nous passerons la soirée !
Jour 10 : Le tour du fjord de Hesteyri
Hesteyri était autrefois un village habité. Il a notamment abrité une station baleinière norvégienne et par la suite une usine de harrang. Le village a compté jusqu’à 80 habitants. Il a été abandonné au début des années 50 avec l’arrivée d’une ère plus prospère au sud de l’île.
Nous entamons notre visite de Hesteyri en nous dirigeant vers la station baleinière. Si le bâtiment s’est effondré, la cheminée tient toujours debout. Nous l’apercevons depuis le village. Le sentier qui longe la côte nous fait passer près d’une colonie de phoques communs. Nous en profitons pour les observer quelques dizaines de minutes et faire quelques photographies.
Arrivés à la station baleinière, nous découvrons un endroit tout à fait glauque (et un peu dangereux tant la cheminée menace de s’effondrer). Nous essayons de reconstituer l’emplacement de chaque bâtiment et nous faire une idée de ce qu’a pu représenter la vie au fond du fjord de Hesteyri.
De retour dans le village, nous visitons rapidement le cimetière de Hesteyri et l’ancien emplacement de l’église qui fut déplacée au sein du village de Súðavík. Une plaque rappelle que les habitants de Hesteyri, en quittant les lieux, ont emmené avec eux leur église.
Le cimetière est situé juste à côté du camp. C’est donc le lieu idéal pour les personnes qui aiment les ambiances un peu sombres 🙂
Nous terminons la journée avec une petite randonnée vers l’ouest cette fois, pour voir le phare de Sléttueyrar. Le sentier nous emmène dans les montagnes où nous traversons une zone de toundra. Nous y croisons un petit groupe de lagopèdes alpins avant de redescendre, attirés par un bateau échoué que nous avons repéré.
Enfin, nous rentrons au camp et allons dire au revoir au gérant de la Doctor’s House. Notre trek de 10 jours à Hornstrandir s’achève. Nous sommes fatigués, sales et nous avons faim! Mais nous sommes surtout heureux d’avoir vécu toutes ces aventures. Nous repartons la tête pleine de souvenirs et les cartes mémoires de photos. Sur le trajet retour, nous discutons déjà de la prochaine aventure. Ça sera surement le massif du Dovrefjell en hiver!
Informations pratiques :
Le climat des Westfjords
Inutile de vous dire que le climat Islandais est rude. Mais les Westfjords, sont exposés au nord, à l’ouest et à l’est, sont des territoires qu’il ne faut pas prendre à la légère.
Hornstrandir est la pointe nord des Westfjords. Les vents y dépassent régulièrement 100km/h et la pluviométrie y est plus importante qu’ailleurs. J’ai vécu des situation très difficile dans la réserve ces 5 dernières années, et je ne peux que vous conseiller de bien vous renseigner avant d’y aller. Si vous êtes randonneurs débutants, et/ou que vous n’avez pas l’habitude du froid et de l’humidité, alors ce trek n’est pas fait pour vous, en tout cas pas seul, en autonomie.
Pour aller plus loin, j’ai rédigé un guide complet sur la réserve de Hornstrandir ici.
Comment rejoindre Ísafjörður
Il n’y a pas beaucoup d’options pour se rendre à Ísafjörður. Vous avez le choix entre une location de voiture qui revient assez cher, car des frais importants (150€) s’appliquent lorsque le lieu de retrait et de retour ne sont pas les mêmes. Et un vol domestique de Reykjavík à Ísafjörður.
Le trajet en voiture dure de 6 à 7 heures depuis l’aéroport de Keflavik. L’avantage est que ça permet de visiter une partie du pays en route. A partir de 3 personnes, le trajet en voiture revient moins cher que le trajet en avion.
Quant au trajet en avion, il dure 45 minutes. Le vol décolle de l’aéroport domestique de Reykjavik et atterrit à Isafjordur. Une petite navette permet ensuite de faire les 4 km qui séparent ce petit aéroport du centre d’Ísafjörður.
Comment aller et quitter Hornstrandir
Même si dans cet article, mon ami Urip et moi rejoignons Hornstrandir par la terre en traversant le glacier Drangajökull, le moyen le plus simple de se rendre dans la réserve naturelle de Hornstrandir est de prendre le Ferry. Vous pouvez réserver avec les compagnies West Tours ou Borea Adventures qui vous déposeront dans le fjord de votre choix. La traversée coûte une centaine d’euros pour les fjords du sud.
Les règles de la réserve naturelle de Hornstrandir
La réserve naturelle de Hornstrandir est une zone protégée depuis 1975. Voici quelques règles élémentaires si vous décidez de vous y rendre :
- Il est interdit de camper ailleurs que dans les camps, sauf cas de force majeure. Veillez donc à planifier vos journées de sorte à passer d’un camp à l’autre.
- Il est demandé aux randonneurs de ne laisser aucune trace de leur passage. Les poubelles doivent être transportées jusqu’au retour à Ísafjörður. La nature doit rester telle qu’elle était, il est interdit de déplacer des végétaux, les pierres, le bois flotté…
- Les sentiers doivent être empruntés en priorité pour préserver la végétation.
- Il est demandé d’utiliser uniquement les toilettes sèches présentes à chaque camp.
- Les animaux domestiques, les vélos et les drones sont interdits dans la réserve.
- Il est interdit de nourrir les animaux sauvages ou d’essayer d’interagir avec eux. Les renards polaires ne doivent pas être approchés. Certains individus sont peu craintifs, mais ce n’est pas une raison pour rompre cette règle.
- Enfin, comme partout en Islande, il est interdit de faire du feu dans la réserve naturelle de Hornstrandir.